« Hobby horsing » en Pologne: un sport en plein essor malgré les préjugés

Le hobby horsing, un sport qui allie l’équitation et l’athlétisme, connaît un essor fulgurant en Pologne depuis la pandémie de Covid. De plus en plus de jeunes filles désirent s’investir dans cette discipline. Malgré son développement rapide, le hobby horsing fait face à des défis, notamment le manque d’entraîneurs qualifiés et les préjugés du public. 

Dans une école primaire de Varsovie, un groupe de filles s’active, impatientes de commencer leur entraînement. Le sport qu’elles pratiquent fait vibrer les cœurs des jeunes Polonaises. Le hobby horsing, qui combine l’équitation et l’athlétisme, a fait son apparition dans le pays quelques années avant la pandémie de Covid. D’origine finlandaise, ce sport constitue une alternative séduisante à l’équitation traditionnelle, souvent jugée trop coûteuse pour de nombreuses familles.

Les bâtons ornés d’une tête de cheval dans les mains, appellés “les hobby horses”, les jeunes sportives commencent leur entraînement. Wanda Podoba, présidente du club Stowarzyszenie Klub Sportowy Horsy Team se tient fièrement en bord de piste, observant les enfants. « Notre mission est d’intégrer les enfants qui partagent la même passion ”, explique la quadragénaire.

Hobby horses, les bâtons ornés d’une tête de cheval, souvent fabriqués par des sportives, eux-même. Le prix peut varié de 50 à 2000 euros. Crédit photo : Anna Vasylenko / CELSA.

Un sport émergent 

“Nous voulons montrer que c’est une activité sérieuse, comme les autres sports », défend-elle avec conviction. À ses côtés, son mari Piotr, toujours prêt à soutenir sa femme, acquiesce. « C’est incroyable de voir à quel point ce sport a pris de l’ampleur en si peu de temps ». Selon lui, le véritable tournant est survenu quand le club a organisé sa première compétition en hobby horsing pendant la pandémie. Pourquoi hobby horsing est devenu si populaire en Pologne ? “Peut-être grâce à elle”, annonce Piotr avec un grand sourire.

Wanda a découvert l’inspiration pour se lancer dans le monde du hobby horsing grâce à sa fille. Passionnée par les chevaux, celle-ci a commencé à s’intéresser aux hobby horses pendant le confinement. Elle a alors demandé à sa mère de lui fabriquer son propre hobby horse. Aujourd’hui, Wanda a transformé cette passion en une véritable entreprise. A part l’organisation de cours et des compétitions, elle fabrique et vend des hobby horses. Cela permet à d’autres filles de partager cet amour des chevaux en bois.

Les jeunes sportives du club Stowarzyszenie Klub Sportowy Horsy Team commencent leur entrainement en hobby horsing. Crédit photo : Anna Vasylenko / CELSA.

Entre l’athlétisme et l’équitation

Après un court échauffement, la course, le galop…Les filles franchissent les obstacles l’une après l’autre. “Dans notre club de hobby horsing, nous avons la chance de bénéficier de l’expertise de deux entraîneurs, chacun spécialiste dans son domaine”, explique Piotr. L’un est un athlète, tandis que la deuxième est entraîneuse en équitation. Ensemble, ils donnent des cours qui allient ces deux disciplines.

Les séances se déroulent de manière dynamique, avec les participantes réparties en deux groupes. “Pendant qu’une partie du groupe s’entraîne avec un coach d’athlétisme, l’autre se concentre sur des exercices d’équitation”, détaille Wanda avec une voix calme et douce. Cette approche permet aux étudiantes de développer à la fois leur agilité et leurs compétences équestres, même si les chevaux ne sont pas réels.

Dans le monde du hobby horsing, on ne peut voir que des jeunes filles pratiquer cette discipline. Bien que les garçons puissent également s’y addoner, ils restent souvent en minorité, freinés par des stéréotypes et des préjugés. Contrairement à la Finlande, berceau de ce sport, qui le pratique de manière plus mixte.

Les élèves du club Stowarzyszenie Klub Sportowy Horsy Team en train de s’entraîner. Crédit photo : Anna Vasylenko.

“Durant l’entraînement, j’essaie de combiner différents exercices et de les changer chaque semaine”, annonce Olgert, un entraîneur spécialisé en athlétisme qui arbore un tee-shirt bleu clair portant le mot « instructor » sur le dos. Passionné par l’éducation physique et le sport, Olgert a rejoint le club il y a quatre mois. Il aime interagir avec les enfants et de les voir heureux pendant ces cours. “ Je voudrais qu’ils s’amusent et qu’ils apprennent en même temps quelque chose de nouveau », explique Olgert.

Répousser les limites

Dans le monde du hobby horsing, enseigner aux enfants à franchir des obstacles et à changer de direction pendant la course est fondamental. Chaque séance commence par un échauffement, essentiel pour préparer les jeunes participants, tant sur le plan physique que mental. À mesure qu’ils gagnent en confiance et en compétences, les entraineurs  augmentent progressivement la hauteur des obstacles. Cela encourage les enfants à repousser leurs limites et à développer leur agilité. “ Bien que je n’aie pas d’expérience préalable dans ce sport, j’ai constaté qu’il partage de nombreuses similitudes avec l’athlétisme, notamment en termes de technique et de discipline”, assure Albert qui pratique l’athlétisme depuis 12 ans.

Les jeunes sportives durant leur entraînement en hobby horsing au Stowarzyszenie Klub Sportowy Horsy Team. Crédit photo : Anna Vasylenko.

Passion au coeur de l’action

Natalia, une jeune athlète de 19 ans, incarne l’esprit du hobby horsing. Assise dans un café du centre commercial, elle partage son parcours avec enthousiasme. « Le hobby horsing combine toutes mes passions », explique-t-elle. Avec ses longs cheveux châtains et ses yeux gris pétillants, elle incarne l’énergie et la détermination. Présidente de l’association nationale du hobby horsing, elle est une sportive nationale reconnue. Sportive depuis son plus jeune âge, Natalia a pratiqué l’athlétisme et l’équitation, avant de se lancer en hobby horsing en 2016.

Dans son domaine, elle participe à des compétitions internationales et organise des événements en Pologne pour promouvoir ce sport. “ En plus, je fabrique et vends mes hobby horses et je travaille également dans le marketing « , raconte Natalia. Son engagement va au-delà de la simple pratique, car elle cherche à encourager les jeunes à poursuivre leurs rêves sportifs. La jeune femme est convaincue que le hobby horsing peut offrir de nombreuses compétences transférables aux enfants, leur permettant de devenir des athlètes accomplis.

Natalia, athlète nationale reconnue, coach sportif, présidente de l’Association Polski Zwiazek Hobby Horse, dans un café à Varsovie.

Sport comme les autres

Cependant, le chemin n’est pas toujours facile. Natalia fait face à des critiques sur les réseaux sociaux, où certaines personnes ne comprennent pas encore ce sport. Pour elle, le décalage entre la perception publique et la réalité de ce sport est douloureux. « Les gens trouvent cela bizarre de sauter avec un jouet, sans réaliser le travail acharné que cela implique », souligne-t-elle, frustrée. “C’est un vrai sport, et nous sommes de vraies athlètes « , déclare-t-elle.

Lorsque les gens voient des athlètes courir et sauter sans hobby horse, ils admirent leurs compétences. Mais dès qu’un hobby horse entre en jeu, cela devient « étrange » à leurs yeux. « Ça n’a pas de logique », s’insurge Natalia.  Cette incompréhension peut toucher les jeunes filles qui débutent dans le hobby horsing, les rendant vulnérables face aux jugements extérieurs. Alors que plusieurs personnes restent sceptiques envers le hobby horsing, de nombreux enfants qui commencent par ce sport finissent par explorer d’autres disciplines sportives.

Natalia insiste sur la diversité des disciplines que le hobby horsing englobe, telles que la danse, le dressage, le saut d’obstacles, et même l’organisation d’événements. Pour Natalia, ces aspects variés sont ce qui rend le hobby horsing si enrichissant. Elle attribue une partie de son développement personnel à cette pratique. « Je pense que sans ce sport, je ne serais jamais devenue la personne que je suis aujourd’hui », assure la jeune femme.

Quand le corps prend le devant

Un autre défi majeur du hobby horsing en Pologne est le manque d’entraîneurs qualifiés pour guider ces novices. « J’ai fait beaucoup de bêtises au début de ma carrière, j’ai eu mes traumatismes”, raconte l’athlète. “Ça peut être dangereux, physiquement et psychologiquement”, constate la sportive qui peut sauter à la hauteur d’un plus d’un mètre avec son destrier. 

La plupart des coachs proviennent du milieu de l’équitation, mais le hobby horsing diffère fondamentalement de cette discipline, étant plus proche de l’athlétisme. Alors qu’en équitation, c’est le cheval qui effectue le travail, en hobby horsing, ce sont les corps humains qui sont en action. Elle souligne également ses propres difficultés à trouver un mentor adapté : “J’ai déjà atteint le niveau national, et je ne peux pas trouver une personne qui pourrait m’accompagner.” Cette absence de soutien approprié rend la progression encore plus difficile pour les athlètes en herbe. D’après la sportive, l’auto-formation a ses limites et, sans un entraîneur qualifié pour guider les débutants, le risque de mauvaises pratiques ou de blessures augmente.

Plus qu’un sport, la communauté

 « Les réseaux sociaux, c’est la force du hobby horsing », croit savoir la sportive. Ils permettent à la communauté de se rassembler, de partager des expériences et de se soutenir mutuellement. Grâce aux plateformes sociales, cette communauté dynamique continue de se développer, rassemblant des passionnés de tous horizons et créant des liens forts entre les athlètes.

Natalia se souvient de sa participation à une compétition en Finlande, où elle a rencontré des sportifs venus d’Italie, d’Abou Dabi, d’Algérie… » Quand les athlètes internationales se retrouvent dans un même endroit, on réalise à quel point notre communauté est grande « , déclare Natalia, qui rêve d’un avenir où le hobby horsing sera reconnu et respecté comme un véritable sport.

Pourtant, malgré cette passion et cette détermination, un long chemin reste à parcourir. Le hobby horsing n’est pas encore officiellement reconnu par l’État en Pologne, ce qui entraîne un manque de financement et de ressources. « Nous nous battons pour faire entendre notre voix. Ce sport mérite d’être soutenu », conclut Natalia.

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