En Pologne, vers une disparition du catéchisme à l’école publique ?

En juin 2024, Barbara Nowacka, ministre de l’Education polonaise, annonçait la réduction des heures de catéchisme à l’école publique. Une décision qui s’inscrit dans une logique de sécularisation de la Pologne mais aussi de bataille politique.

En Pologne, le catéchisme à l’école est sur la sellette. Après huit ans de politique conservatrice du parti Droit et justice (PiS), soutenu sans ambiguïté par l’épiscopat local, les libéraux de centre droit de la Coalition civique (KO), au gouvernement depuis 2023, ont tenu à marquer leur différence en entamant des mesures pour séculariser le pays, à commencer par l’école. 

Actuellement, les jeunes Polonais peuvent choisir, en option, d’étudier la religion ou l’éthique. Pendant le catéchisme, les plus jeunes découvrent Jésus, la création du monde et l’apparition de Marie et Joseph. Les plus âgés, eux, étudient l’Église et les sacrements. Mais en juin 2024, la ministre de l’Education Barbara Nowacka, a annoncé vouloir réduire les heures de catéchismes.

Les élèves polonais passeront de deux à une heure hebdomadaire d’enseignement religieux à l’école publique, à partir de septembre 2025. Mais gare à l’emploi du temps. Le catéchisme devra être positionné aux extrémités des journées pour ne pas inciter les élèves à s’inscrire pour de simples questions d’emploi du temps.

Cette décision s’inscrit dans une volonté du gouvernement de séparer l’Eglise de l’Etat. “C’est une question très politique. Le PiS était attaché à la place de la religion catholique dans la société. Une fois la coalition libérale arrivée au pouvoir, elle a voulu éloigner cet enseignement religieux de l’école. C’est aussi une manière pour eux d’imposer une ferme différence”, explique Kamil Krzykowski, étudiant en organisation du travail à l’Université de Varsovie et co-auteur d’un rapport sur les jeunes qui quittent les institutions de l’Eglise catholique en Pologne. Une forme “d’offensive anti-cléricale qui pourrait un jour déboucher sur la suppression complète du catéchisme à l’école”, selon Malgorzata Ostaszewska, enseignante de catéchisme à Varsovie depuis une vingtaine d’années.

Un désintérêt de la religion chez les jeunes Polonais

C’est aussi une question économique qui guide cette volonté de séculariser l’école. En effet, les enseignants de catéchisme sont actuellement rémunérés par l’Etat et donc par les citoyens, via les impôts. “Nous avons dépensé 1,5 milliard de zlotys (357 millions d’euros), par an pour le maintien de la catéchèse. C’est une somme importante. Certains citoyens préféreraient que leurs impôts servent à d’autres choses, y compris dans l’éducation”, insiste Zuzanna Jaworska, étudiante en organisation du travail à l’Université de Varsovie et co-autrice du rapport avec Kamil Krzykowski.

Car si le gouvernement a la volonté de séculariser l’école, c’est un mouvement qui imprègne de manière générale la société polonaise, notamment les jeunes. “Les parents se désintéressent peu à peu de la religion catholique, et les enfants avec. Le maintien du catéchisme à l’école publique pâtit forcément de la situation”, estime Malgorzata Ostaszewska. Selon le rapport des étudiants de l’université de Varsovie, en six ans, la pratique de la religion est passée de 69% à 23% chez les 18 – 24 ans. Depuis plusieurs années, Malgorzata Ostaszewska voit les élèves quitter les cours de catéchisme, particulièrement dans les dernières années de l’école primaire. « Beaucoup ne sont pas très attachés à la religion et préfèrent arrêter cette option pour quitter l’école plus vite« , remarque l’enseignante.

Si la société polonaise semble en pleine sécularisation, la mesure a été l’objet de nombreuses contestations. L’Église catholique a notamment reproché au gouvernement d’avoir pris cette décision sans les consulter. Elle accuse la ministre de l’Éducation d’aller à l’encontre du droit des parents à élever leurs enfants conformément à leurs convictions. Alors qu’environ 6% seulement des élèves étaient scolarisés dans des écoles non-publiques, en 2022-2023, cette mesure pourrait convaincre certaines familles à sauter le pas.

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