Comment Varsovie veut transformer son métro en source de chaleur
Baisser la température de 4 degrés sur les quais du métro de Varsovie, mais surtout réutiliser la chaleur qui habite les galeries du transport souterrain. C’est le nouvel objectif de la ville, dans le cadre d’un partenariat entre public et privé pour la transition énergétique.
L’air est frais à Varsovie, mais une fois sur les quais du métro, la chaleur devient insoutenable. Une situation désagréable pour les usagers, mais qui pourrait très bien être une source d’innovation pour le mix énergétique polonais. Dans le quartier de Bomowo, à l’ouest de la ville, une première station de métro a été retenue par les autorités publiques. Le but, « récupérer une partie de l’air chauffé par les frottements des roues des trains de métro, les moteurs électriques et la présence de passagers pour alimenter le réseau de chauffage urbain de Varsovie », explique Anna Barton, porte-parole du métro de la capitale. Ce seront « des bâtiments, des maisons et de l’eau dans la ville » qui bénéficieront de ce programme.
Amorcer la transition énergétique
Car si de tels projets voient le jour, c’est parce que la Pologne est en pleine phase de transition énergétique. Sur le plan européen, le pays est un mauvais élève. Il faut dire qu’il sort difficilement d’une tradition minière et d’un mix énergétique composé à 85% d’origine fossile, dont 45% provenant du charbon selon un rapport publié en 2022 par l’Agence Internationale de l’Energie.
A l’aube d’une neutralité carbone exigée par l’Union européenne d’ici 2050, Anna Barton explique la ligne à suivre : « il y a une stratégie nationale visant à diversifier les sources d’énergie et réduire la dépendance aux combustibles fossiles ». Une stratégie dont on voit déjà les premiers effets. Entre Poznan et Varsovie, les champs se remplissent de panneaux solaires, quelques cheminées de centrales thermiques crachent une fumée blanche.
Alors la capitale polonaise se fait le visage du changement énergétique. Pour preuve, le fameux phénomène du smog qui pollue l’air de la capitale est en pleine décroissance. « Un accord a été signé en février 2024 pour améliorer l’utilisation efficace de l’énergie ». Elle ajoute que le projet n’est pas encore installé, mais que « la station de Bemowo accueillera un système pilote » avant que cette solution ne soit étendue à d’autres stations. Un choix minutieusement étudié, car l’installation d’un tel système requiert des conditions précises. La plus importante étant de placer ce système à proximité « d’un réseau de chauffage existant, afin de garantir une alimentation efficace pour les consommateurs » précise la porte-parole.
Si la démarche est en partie publique, elle résulte aussi d’un partenariat avec l’acteur privé Veolia. Car l’entreprise d’énergie « gère le plus grand réseau de chauffage urbain de l’Union européenne », explique Pawel Zbiegniewski, directeur de la communication chez Veolia Energie Varsovie. À cet égard, ce sont près de 1900 km de canalisations pour une « fourniture de chaleur à plus de 1,4 millions de varsoviens ». C’est d’ailleurs à l’occasion d’un concours interne d’innovation que Veolia a mis ce projet sur la table. « Il s’agit d’un vaste programme qui, entre autres, explore la possibilité de récupérer la chaleur des salles de serveurs et des eaux usées, chaleur qui normalement est perdue ». Un projet qui concerne le métro donc, mais qui voit aussi plus grand.
Quelles économies ?
« Seulement à Varsovie, cette chaleur disponible pourrait couvrir les besoins de chauffage d’au moins 275.000 habitants », détaille Anna Barton. Car dans le monde, l’excès de chaleur est la plus grande source d’énergie inutilisée dans le monde. En revanche, gare à la répartition des gains. La chaleur récupérée dans le métro ne sera pas seulement exploitée par la ville mais fera aussi l’objet d’une gestion partagée avec l’entreprise privée Veolia.
Si ce projet pilote pourrait être un succès à Varsovie, il n’est pas tout-à-fait nouveau. « Une solution similaire est mise en œuvre à Londres, à plus grande échelle bien sûr » précise Pawel Zbiegniewski. De fait, la Pologne ne s’arrête pas là en termes de partenariats. Anna Barton explique que le « Bureau des Infrastructures veut trouver des alternatives aux combustibles fossiles. » mais ajoute surtout que le métro n’est pas la seule source viable car la récupération de chaleur peut aussi venir des eaux usées ou des data centers. Des solutions prometteuses pour le futur du mix énergétique polonais.
Laisser un commentaire